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Flowing slowly - Ralentir  par Yeba Olayé.
 3 Juillet, 2024
(English - French)

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Je suis en ce moment, entre ciel et terre, posée dans un avion qui me ramène vers mon quotidien. Alors que nous planons entre deux mondes, dans un espace où le temps n’a plus d’importance ni d’emprise, je reprends mon souffle. Pour la première fois depuis si longtemps, j’ai huit heures devant moi. Alors, je vous écris.

Pendant que le film sur les consignes de sécurité résonne sur le grand écran dans l’avion, je ne peux m’empêcher de fermer les yeux. Je repense aux six derniers mois qui viennent de s’écouler. Était-ce l’éclipse, ou Mars rétrograde ? D’autres diraient tout simplement que c’était la crise qui venait de faire une entrée fracassante dans nos vies… Une chose ne m’avait pas échappé, nous étions nombreux à être pris dans un torrent inhabituel. Quelque chose était en train de se passer, comme si une ère devait faire place à une autre, et que ce qui avait fonctionné n’avait plus sa place.

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L’avez-vous ressenti également ? Plus rien désormais ne semble se faire avec fluidité. Je pense à ces cœurs qui ont arrêté de battre forts pour leurs amours, leurs passions, à cette injonction qui semble récompenser la quantité au profit de la qualité, à ce bruit incessant qui nous empêche de nous connecter à notre propre musique intérieure. Personne ne me convaincra du contraire, le temps a changé de rythme et nous sommes comme pris dans son étau à mesure qu’il s’accélère… Il y a eu dans cette période de crise systémique une invitation à s’arrêter et se poser les bonnes questions.


Je suis un vrai Bélier, une véritable force de la nature. J’ai toujours été animée par l’envie de réaliser des choses, à tout prix. Lancer des projets nouveaux, m’exprimer à travers eux me donne le sentiment d’exister. Il n’y a rien de plus satisfaisant pour moi que de commencer d’une idée et de déployer l’énergie folle que cela requiert pour la voir se concrétiser dans le monde réel. Dire que je suis stimulée par Mars, le Dieu de la guerre, me semble être un euphémisme. Le seul mode de fonctionnement que je connaisse est celui de passer à l’action, de tenter le tout pour le tout, même par la force, de m’armer de persévérance, voire de résilience jusqu’à ce que ça passe. Et quand cela ne passe pas, je recommence, jusqu’à y arriver.

" J’ai toujours été animée par l’envie de réaliser des choses, à tout prix. Lancer des projets nouveaux, m’exprimer à travers eux me donne le sentiment d’exister. ".  

C’est auréolée de confiance que j’ai mis dans l’année 2024. Après une magnifique campagne de fin d’année, nous allions lancer notre sac ORI. Ce modèle était à ce jour le plus beau modèle que je n’avais jamais dessiné. Il avait déjà son petit succès sur photo, et une jolie liste d’attente auprès des amies de la marque. Il suffisait juste de régler un dernier détail technique avec l’atelier : effacer un petit pli persistant dans sa jolie courbe parfaite. Un pli qui a fait son apparition soudaine dans le temps, mais un détail, cependant.

J’aurais aimé que ce soit le cas.

Ce petit pli, anodin de prime abord, s’est transformé en un problème coriace et persistant. Nous avons déployé des trésors d’ingéniosité pendant des semaines avec l’atelier pour l’effacer. Mais rien n’y a fait. Après quelques prototypes, nous avons dû renoncer à sortir le modèle en l’état.

Quand Thomas, le chef d’atelier, m’a dit :
"Chère Yeba, nous devons repenser toute la structure de ce modèle. Il faut reprendre tout depuis le début. Il va nous falloir au moins six mois de plus », mon cœur s’est fissuré.

« Mais nous y sommes presque. Nous devons faire vite. Nous pouvons encore y arriver. Faisons-le, pour mes clientes, pour la marque, pour le business, pour moi ». J’ai insisté. 

Il m'a répondu, les yeux pleins de compassion :
« Je pense que l’acharnement n’a jamais rien apporté de bon. En toute amitié, je vous conseille de renoncer pour l’instant ».


Avant qu’il ne finisse sa phrase, j'eus le sentiment d'être plongée soudainement dans la nuit.



« Renoncer »… Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Comment fait-on pour renoncer ? Ce mot m’a tourmentée des jours durant. Ce mot m’a arraché des nuits de sommeil. J’avais été tellement convaincue de la force de ce nouveau modèle ORI (qui veut dire la tête, l’intelligence en yoruba) que je ne pensais pas qu’il me ferait perdre la tête, pour ne pas dire la raison. Tout en moi résistait désespérément.

Mais le marché ralentissait, la crise commençait à se faire sentir. Des amies entrepreneures autour de moi étaient obligées de fermer. Le moment n’était donc pas propice à des coups d’éclat. J’étais encore un peu à l’abri, et à la sortie de l’hiver, le printemps ramènerait l’énergie et l’envie.

Seulement, le printemps n’est jamais arrivé.

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Se poser à la fenêtre et voir le ciel pleurer tous les jours pendant des mois vous touche particulièrement. Je mentirais si je disais que cela ne m’a pas impactée. Par la force des choses, j’ai commencé à vivre à un rythme différent, plus lent, certes mais plus humain, privilégiant la famille, les instants simples et les moments pour soi.


"Parfois, tout se passe comme prévu. D'autres fois, la vie vous donne une leçon de patience, de timing, d'alignement, d'empathie, de compassion, de foi, de persévérance, de résilience, d'humilité, de confiance, de sens, de conscience, de résistance, de but, de clarté, de chagrin, de beauté et de vie. Dans tous les cas, vous gagnez," comme le dit si bien Brianna Wiest.

Par la force des choses, j’ai commencé à vivre à un rythme différent, plus lent, certes mais plus humain, privilégiant la famille, les instants simples et les moments pour soi.



Dans ce climat morose, j'ai gagné en sagesse. J'ai appris à être plus indulgente envers moi-même. J'ai appris la vertu de la patience. Indépendamment des opinions des autres, j'ai compris que ma valeur ne se mesurait pas à mes résultats actuels, mais à mon parcours, à ce qui sommeillait et semblait briller en moi., que seule moi pouvais voir (ou commencer à voir).

Ces derniers mois, j'ai ressenti de la lassitude à constamment me sentir en retard, surtout lorsqu'il était temps de lancer des campagnes, de nouveaux modèles ou initiatives. Avec un peu de recul et depuis les nuages d’où je me trouvais, j'ai conclu un pacte avec moi-même : je trouverais un moyen d'échapper à cette malédiction du temps, de l'utiliser judicieusement, non pas pour faire plus, mais pour faire mieux, non pas pour rivaliser avec quiconque, mais pour explorer mes dons uniques. Après tout, ce qui reste, ce sont les choses faites avec amour, portant une histoire, un message... Quand on réalise à quel point une pièce est personnelle, on veut la chérir davantage et la garder longtemps, quelle que soit la tendance du moment. Cette approche m’a toujours semblé juste, même si je l’ai parfois perdue de vue. Plus tard, j'espère que vous ressentirez combien cette marque "YEBA" n'est pas un projet marqué par l'ambition de croître à tout prix, mais une marque personnelle, un travail du coeur, marqué par une passion sincère, le désir d'être présente à vos côtés.

Mon cœur sourit souvent quand je croise une femme qui porte un de mes sacs. À chaque fois, elle semble auréolée d’une force qui m’éblouit et rien que cela me réconcilie avec l’idée qu’un objet symbolique dans nos mains peut révéler le meilleur de nous.
En tout cas, « Vous », révélez le meilleur de moi.

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Quels sont ces trésors enfouis en vous que vous n'avez pas encore révélés ? Quels sont ces voyages intérieurs et ces rêves en vous négligés depuis bien trop longtemps ?

Cet été, je reviens avec une campagne intitulée "Flowing Slowly," une invitation à ralentir.  Je nous souhaite de faire une pause, de nous laisser guider par nos rythmes intérieurs, de parvenir à nous oublier dans des activités qui nous laissent le sentiment d'exister vraiment. Cet été, créons des moments qui nous plongent dans cet état suspendu où les vastes possibilités en nous se matérialisent enfin, où les flux de nos pensées nous invitent dans des mondes inexplorés.

Flowing Slowly est un souhait, une profonde contemplation que je vous offre,  à vous ma Tribu. Puissions-nous reprendre notre souffle, loin du bruit quotidien, loin des appels des algorithmes, loin du tumulte des émotions intenses artificiellement créées en nous. Puissions-nous trouver la paix, la créativité et la force qui existent en chacune de nous.

Je vous souhaite un très bel été.

Avec toute mon affection,
Yeba 


Author : Yeba Olayé 
Photography: Babeth Albert & Nele Bogaerts
M
odels : Zoë Loen & Femke Neyt
Location: Scala dei Turchi, Sicili



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